Entre exigences de performance, prévention des abus et respect du droit à la vie privée, les employeurs naviguent dans un environnement juridique de plus en plus exigeant. En 2025, plusieurs décisions de justice sont venues préciser ce qu’un chef d’entreprise peut — et ne peut pas — faire en matière de surveillance et de preuve.
💼 Peut-on utiliser une preuve trouvée dans l’entreprise ?
La jurisprudence confirme que l’employeur peut utiliser certaines preuves numériques, à condition de respecter deux conditions :
- Une atteinte légitime
- Proportionnelle au but poursuivi
📎 Clé USB, ordinateur, messagerie pro
➡️Cass. soc., 25 septembre 2024, n°23-13.992 : l’employeur a pu utiliser un fichier extrait d’une clé USB personnelle appartenant au salarié, sans son autorisation.
L’accès a été jugé justifié et proportionné dans le cadre d’un contentieux sur un détournement de données.
🎤 Enregistrements clandestins : recevables… sous conditions strictes
Le principe :
Traditionnellement, un enregistrement réalisé à l’insu d’une personne (ex. : une discussion entre un salarié et son manager) était considéré comme une preuve illicite et déloyale, donc irrecevable.
➡️Revirement partiel – Assemblée plénière de la Cour de cassation, 22 décembre 2023, n°20-20.648.
Une preuve obtenue de manière déloyale (ex. : enregistrement secret) peut être admise en justice, si elle est indispensable à l’exercice du droit à la preuve et proportionnée au but poursuivi.
Cass. Soc. 10 juillet 2024, n°23-14.900 : position confirmée pour l’existence de faits de harcèlement moral.
✅ En clair, un enregistrement clandestin peut être recevable si :
- Aucune autre preuve n’est accessible,
- Il est utilisé pour défendre un droit fondamental (ex. : harcèlement, discrimination),
- L’atteinte aux droits de l’autre partie est proportionnée à l’enjeu du litige.
📍 Géolocalisation & vie privée : une preuve à manier avec précaution
La géolocalisation peut être utilisée pour contrôler l’activité d’un salarié mobile (livreur, commercial, technicien itinérant), mais uniquement dans le respect du cadre légal :
✅Information préalable du salarié,
✅Déclaration à la CNIL si nécessaire,
✅Consultation du CSE
✅Limitation à des horaires de travail.
Soc. 14 févr. 2024, n° 21-19.802 : un employeur a été sanctionné pour avoir licencié un salarié en se fondant sur les données d’un système de géolocalisation qui n’avait pas été déclaré au CSE ni porté à la connaissance du salarié. Les juges ont jugé cette preuve irrecevable et le licenciement sans cause réelle et sérieuse.
🧭 Bonnes pratiques pour les employeurs
Risque |
Réflexe |
Pourquoi |
Collecte de preuves numériques |
Charte informatique claire et diffusée |
Cadre juridique opposable au salarié |
Surveillance (vidéos, GPS, emails) |
Informer les salariés + CSE + déclarer à la CNIL |
Rendre les preuves licites et utilisables |
Contentieux RH (harcèlement, faute) |
Traçabilité écrite. Recourir à une enquête externe |
Preuve du respect des obligations patronales |
Réunions sensibles |
Compte rendu rédigé, validé par les deux parties |
Prévenir les détournements ou enregistrements unilatéraux |
🧑💼 En résumé
L’entreprise de 2025 n’est pas seulement un lieu de performance, c’est aussi un espace juridique surveillé.
La montée des contentieux sociaux, du RGPD, et des outils technologiques pousse l’employeur à professionnaliser sa gestion de la preuve, comme un acteur judiciaire à part entière.
👉 Notre cabinet se tient à votre disposition pour tout accompagnement ou conseil juridique sur ces sujets sensibles.